En ce mercredi 29 janvier 2025, les Congolais sont rivés à leurs écrans pour suivre en direct le message très attendu du Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo. Depuis la Cité de l’Union africaine, le Chef de l’État doit s’exprimer sur les récents développements « sécuritaires et socio-économiques » du pays, dans un contexte d’urgence nationale.
Mercredi 29 janvier 2025 – Cité de l’Union africaine, Kinshasa – RADIO-TÉLÉVISION NATIONALE CONGOLAISE (RTNC)
Une allocution sous haute tension
Depuis 48 heures, la République Démocratique du Congo fait face à une détérioration sans précédent de sa situation sécuritaire. Une partie du territoire national a été envahie par « des forces étrangères venues du Rwanda », selon les termes des services présidentiels. Cette crise, qui s’accompagne d’un désastre humanitaire, a poussé le Président à intervenir personnellement pour « orienter la population »et clarifier la position de l’État.
Mise en scène d’un moment historique
« Bonsoir à tous les téléspectateurs qui nous suivent en direct », lance Oscar Mbal Kahij,, présentateur de la RTNC, depuis le bureau présidentiel. Les caméras balaient les couloirs austères de la Cité de l’Union africaine, où le Président Tshisekedi finalise ses derniers préparatifs. « Le peuple congolais, au pays comme à travers le monde, attend des réponses fermes », insiste le journaliste, soulignant l’émotion palpable dans l’antichambre du pouvoir.
Un discours aux enjeux multiples
Les analystes anticipent un discours axé sur :
- La réaffirmation de la souveraineté nationale face à « l’agression rwandaise »
- Les mesures d’urgence pour les populations de Kousema et zones frontalières
- Un plan de relance économique dans les territoires affectés
- Un appel à la solidarité panafricaine et internationale
« Ce message pourrait marquer un tournant dans la gestion des crises par ce régime », commente en off un conseiller présidentiel, sous couvert d’anonymat.
Prochaines étapes
Dès la fin de l’allocution, la RTNC proposera un décryptage en plateau avec des experts militaires, des économistes et des représentants de la société civile. La communauté internationale, notamment l’Union africaine et le Conseil de sécurité de l’ONU, surveille attentivement chaque mot du Président congolais.
Discours du Président Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo à la nation
Mes très chers compatriotes,
En ces instants critiques pour notre nation, je m’adresse à vous avec la gravité et la solennité qu’impose la situation. L’est de notre pays, en particulier les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri, fait face à une aggravation sans précédent de la situation sécuritaire. Les forces de défense du Rwanda, en soutien de leur marionnette du M23, poursuivent leur entreprise terroriste sur notre territoire, semant la terreur et la désolation parmi nos populations.
Je partage avec vous la douleur et l’indignation face à ces attaques barbares. Ces actes ne sont pas seulement une attaque contre la République, mais une offense à l’histoire et à la dignité de notre peuple. En ces moments difficiles, je vous appelle à la résilience et surtout à la résistance face à cette situation.
Permettez-moi de vous rassurer : une riposte vigoureuse et coordonnée contre ces terroristes et leurs parrains est en cours. Nos vaillantes forces armées de la République démocratique du Congo, symbole de courage et de patriotisme, sont pleinement mobilisées, prêtes à défendre chaque centimètre de notre territoire.
J’ai personnellement convoqué et présidé des réunions de crise avec une équipe restreinte du gouvernement, le haut commandement militaire, ainsi qu’une réunion interinstitutionnelle, afin d’évaluer les récents développements de la situation et de lever les options pour repousser les agresseurs et reconquérir chaque parcelle de notre territoire.
À cet effet, j’ai nommé ce 28 janvier le général major Évariste Somo Kakoulé au poste de gouverneur militaire du Nord-Kivu, pour renforcer la coordination des opérations militaires et restaurer l’autorité de l’État.
Parallèlement, nous avons engagé d’importantes démarches diplomatiques, notamment au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, ainsi que dans le cadre du processus de paix de Luanda, auquel nous restons pleinement engagés. Malgré les obstacles, nous privilégions la voie du dialogue, mais toujours avec lucidité, tout en restant fermement résolus à défendre notre territoire et notre souveraineté par tous les moyens nécessaires.
Mais ce combat n’est pas seulement celui des FARDC. C’est le combat de tout un peuple, le combat de notre identité congolaise, afin de léguer aux générations futures un pays prospère et en paix.
À tous nos compatriotes, dans chaque province, chaque ville, chaque territoire et chaque village, ainsi qu’à ceux de la diaspora, sans distinction d’appartenance ethnique ou politique, unissons nos efforts. Apportons un soutien indéfectible, moral et matériel, à nos vaillants soldats. Mobilisons-nous comme un seul homme pour défendre notre souveraineté et sauvegarder notre intégrité territoriale.
Je suis pleinement conscient des souffrances de nos compatriotes qui fuient les hostilités. Le gouvernement est instruit d’activer le plan d’urgence humanitaire pour venir en aide aux déplacés.
À vous, habitants de Goma et des environs, je ressens profondément votre douleur, qui est aussi la mienne. Elle traverse nos cœurs et nos âmes, en tant que fils et filles d’une même patrie. Mais face à cette épreuve, je vous exhorte à puiser dans cette force intérieure qui fait la grandeur du peuple congolais. Résistez avec courage, faites preuve de vigilance constante et gardez votre calme malgré l’adversité.
Sachez que nous ne sommes pas restés inactifs. Des plans de contingence sont préparés pour assurer la sécurité de la population civile et prévenir toute escalade de la violence. Les dispositifs de sécurité ont été renforcés pour protéger les zones stratégiques, et nous travaillons sans relâche pour garantir le fonctionnement des services essentiels.
Je tiens à rendre un hommage solennel à tous ceux qui ont payé le prix ultime dans cette lutte pour notre dignité et notre souveraineté. J’ai une pensée pieuse pour le général major Peter Tiimoami, gouverneur militaire du Nord-Kivu, tombé les armes à la main. Je m’incline avec respect devant la mémoire de tous nos militaires et de tous les Wasalendo tombés sur le champ d’honneur.
Je pense aussi aux soldats de la mission de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et aux casques bleus de la MONUSCO qui ont sacrifié leur vie pour la paix, ainsi qu’aux innombrables civils victimes de la barbarie ennemie. Leur courage et leurs sacrifices ne seront jamais oubliés, et nous portons leur flambeau avec la ferme détermination d’achever leur noble combat.
Je voudrais ici interpeller directement la communauté internationale et l’Union africaine. Le Rwanda continue de violer ouvertement et sans scrupule les principes fondamentaux de la Charte des Nations unies, ainsi que les accords régionaux. Pire, ces agissements se déroulent dans une impunité totale, avec un mépris manifeste des règles internationales et des valeurs que ces institutions sont censées défendre.
Cette attitude arrogante, qui ne cherche même plus à masquer ses forfaits, est une provocation inacceptable à l’égard de notre souveraineté et de la stabilité régionale. La présence de milliers de soldats rwandais sur notre sol, leur soutien politique, logistique et militaire à leur pantin du M23, ainsi que leur implication dans l’exploitation illégale de nos ressources naturelles, nous conduisent tout droit à une escalade aux conséquences imprévisibles, mettant en danger toute la région des Grands Lacs.
Votre silence et votre inaction face à la barbarie du régime de Kigali et aux atrocités perpétrées par ces supplétifs sur notre territoire constituent un affront non seulement à la République démocratique du Congo, mais également aux valeurs universelles de justice et de paix.
Le peuple congolais prend acte de cette passivité, qui frôle la complicité. Soyez sûrs d’une chose : la République démocratique du Congo ne se laissera pas humilier ni écraser. Nous nous battrons, et nous triompherons.
Congolaises et Congolais, l’heure est certainement grave, mais notre détermination est encore plus inébranlable. Ce moment critique nous offre l’opportunité de montrer au monde ce qui fait notre force, c’est-à-dire notre unité, sans laquelle tous nos efforts seraient vains.
Je vous appelle à être vigilants, mais à ne pas céder à la haine, aux divisions ou à la violence. Je condamne avec la plus grande fermeté les actes de vandalisme et de pillage qui ont visé certaines missions diplomatiques accréditées en République démocratique du Congo, ainsi que des intérêts privés dans la ville de Kinshasa. Ces comportements irresponsables dénaturent l’expression saine de notre colère face à l’agression barbare qui nous est imposée et jettent une ombre sur les manifestations pacifiques de soutien à nos vaillantes forces armées, qui luttent avec courage et abnégation pour défendre notre souveraineté.
Notre engagement doit rester ferme et discipliné. Nous gagnerons cette guerre par notre unité, notre courage et notre sens de responsabilité, et non par la violence aveugle et par l’anarchie.
Cette victoire ne sera possible que si chaque Congolais, où qu’il soit, prend toute la mesure du combat qui est le nôtre. J’appelle donc la nation entière, hommes et femmes, jeunes et vieux, acteurs politiques, opérateurs économiques, membres de la société civile, confessions religieuses, artistes et sportifs, à se mobiliser, à faire bloc derrière nos vaillantes forces armées, et à contribuer, chacun à son niveau, à l’effort de guerre.
J’ai instruit le gouvernement de mettre en place des mesures rigoureuses de réduction du train de vie des institutions et de leurs animateurs, afin que les ressources ainsi économisées soient directement réorientées vers le soutien à nos forces armées.
Dans cet effort national, j’en appelle également à la responsabilité du secteur privé, qui est invité à contribuer activement à cette cause commune. Nos soldats se battent avec héroïsme pour la défense de notre intégrité territoriale et de notre souveraineté. Ils ont besoin de notre soutien total, qu’il soit moral, matériel ou logistique.
À la jeunesse congolaise, pilier et espoir de notre nation, je vous exhorte à répondre massivement à l’appel de la patrie. Le moment est venu de vous lever, de mettre votre énergie et votre créativité au service de la nation. Nous devons renforcer nos rangs, et chaque jeune Congolais prêt à défendre son pays a une place au sein de nos forces armées. Enrôlez-vous massivement dans l’armée. Vous êtes le fer de lance de notre projet, et votre mobilisation est déterminante pour la victoire finale.
Aux braves populations du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri, vous êtes le symbole de la résilience congolaise, une source d’inspiration pour toute la nation. Vous n’êtes pas seuls dans cette épreuve. La République toute entière se tient à vos côtés, unie dans l’espoir et la lutte. Ensemble, nous ferons face et surmonterons cette épreuve.
À nos vaillantes forces armées et aux vaillants patriotes Wasalendo, véritables sentinelles de la souveraineté nationale, je rends un hommage appuyé et vous exprime, au nom de toute la République, notre reconnaissance infinie et notre fierté inébranlable. Votre bravoure, votre discipline et votre engagement sans faille inspirent et mobilisent tout un peuple déterminé à défendre son territoire.
Sachez-le : la République ne vous abandonnera jamais. Votre combat est le nôtre, et vos sacrifices ne seront jamais oubliés. Vous incarnez l’honneur de la nation congolaise.
À tous mes compatriotes d’ici et de la diaspora, la République démocratique du Congo ne pliera pas. La République démocratique du Congo ne reculera pas. Je ne vous abandonnerai jamais. J’en fais ici le serment.
Le soleil n’a pas cessé de briller sur notre patrie. Ensemble, main dans la main, nous surmonterons cette tempête, et nous ouvrirons une ère nouvelle de paix et de prospérité pour les générations futures.
Que Dieu bénisse la République démocratique du Congo et son peuple.
Je vous remercie.
Fin du discours.
Analyse du discours du Président de la République et des commentaires des journalistes sur le plateau qui ont suivi
1. Contexte et durée du discours
Le Président de la République démocratique du Congo, Félix Antoine Tshisekedi, a prononcé un message à la nation d’une durée de 10 à 12 minutes. Ce discours, bref mais dense, a été marqué par un ton solennel et une urgence palpable, reflétant la gravité de la situation sécuritaire dans l’est du pays, notamment dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri. Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a ensuite décrypté ce discours, en soulignant ses principaux messages et enjeux.
2. Les messages clés du Président
a. Un appel à l’unité et à la résilience
Le Président a insisté sur l’unité nationale, qualifiant la crise actuelle de « combat pour notre identité ». Il a rappelé que la République démocratique du Congo est un pays grand, et que sa grandeur se construit dans des moments difficiles comme celui-ci. Il a appelé à la résilience et à la résistance face à l’agression étrangère, notamment celle du Rwanda et du groupe rebelle M23.
b. La défense de la patrie est sacrée
Le Président a martelé que « la défense de la patrie est sacrée », une phrase qui doit résonner dans l’esprit de chaque Congolais. Il a lancé un appel à la mobilisation générale, exhortant les jeunes et les moins jeunes à s’engager dans l’armée pour renforcer les effectifs des Forces armées de la RDC (FARDC) et des volontaires patriotes (Wazalendo).
c. Les six fronts de la guerre
Le ministre Muyaya a détaillé les six fronts sur lesquels la RDC doit se mobiliser pour faire face à cette crise :
- Le front militaire : Renforcer les effectifs des FARDC et des volontaires Wazalendo.
- Le front diplomatique : Intensifier les efforts diplomatiques, notamment auprès du Conseil de sécurité des Nations unies, où deux réunions spéciales ont déjà eu lieu en moins de 72 heures.
- Le front économique : Protéger les ressources naturelles du pays, qui sont la cible de pillages et d’exploitation illégale.
- Le front judiciaire : Poursuivre les responsables des crimes commis contre les civils et les forces de paix.
- Le front médiatique : Mobiliser les Congolais à travers les médias et les réseaux sociaux pour contrer la propagande rwandaise.
- Le front spirituel : Mobiliser les confessions religieuses pour prier pour la paix et la justice.
d. La condamnation de la communauté internationale
Le Président a dénoncé l’inaction et la passivité de la communauté internationale, qualifiant cette attitude de complicité. Il a souligné que les violations répétées du droit international par le Rwanda, notamment les attaques contre les casques bleus et les civils, ne peuvent rester impunies.
e. La nécessité de préserver la paix et la dignité
Le Président a condamné les actes de vandalisme et de pillage visant des missions diplomatiques et des intérêts privés à Kinshasa. Il a rappelé que le peuple congolais est pacifique par essence et que la défense de la patrie doit se faire dans la dignité et la discipline.
3. Les réactions et commentaires
a. La passivité de la communauté internationale
Le ministre Muyaya a souligné que la passivité de la communauté internationale face aux agressions rwandaises équivaut à une complicité. Il a rappelé que les violations répétées du droit international, y compris les attaques contre les casques bleus, ne peuvent rester impunies.
b. L’appel à la mobilisation
Le ministre a insisté sur la nécessité pour chaque Congolais, où qu’il soit, de contribuer à l’effort de guerre. Il a mentionné que le gouvernement et les institutions doivent montrer l’exemple en réduisant leurs dépenses et en redirigeant les ressources vers la défense nationale.
c. Le rôle du secteur privé
Le secteur privé est appelé à investir dans la paix en contribuant à l’effort de guerre. Une paix durable permettra un environnement économique plus stable et plus prospère pour les entreprises.
d. La résilience des populations
Le ministre a salué la résilience des populations de l’est du pays, qui endurent des conditions extrêmement difficiles. Il a rappelé que la RDC tout entière est solidaire de ces populations et que leur souffrance est partagée par tous les Congolais.
4. Les perspectives pour l’après-29 janvier
Le ministre a annoncé que des mesures concrètes seront prises dès le lendemain du discours pour mettre en œuvre l’appel à la mobilisation. Un mécanisme de collecte de fonds et de soutien aux FARDC sera mis en place. Le gouvernement travaillera à renforcer la cohésion nationale et à éviter les divisions et les stigmatisations.
5. Conclusion
Le discours du Président Tshisekedi a été un appel fort à l’unité, à la résilience et à la mobilisation. Il a rappelé que la défense de la patrie est l’affaire de tous les Congolais, où qu’ils se trouvent. La communauté internationale a été interpellée pour passer des paroles aux actes et mettre fin à l’impunité du Rwanda. Les six fronts (militaire, diplomatique, économique, judiciaire, médiatique et spirituel) constituent une stratégie globale pour faire face à cette crise et restaurer la paix et la souveraineté de la RDC.
Points forts du discours
- Clarté et fermeté : Le Président a utilisé un ton ferme et direct pour transmettre ses messages.
- Appel à l’unité : Il a insisté sur la nécessité de surmonter les divisions et de travailler ensemble.
- Vision globale : Les six fronts montrent une approche multidimensionnelle pour résoudre la crise.
Prochaines étapes
- Mise en œuvre des mesures annoncées par le gouvernement.
- Suivi des actions diplomatiques auprès de l’Union africaine et des Nations unies.
- Mobilisation continue de la population congolaise pour soutenir l’effort de guerre.