Nous venons d’assister à une semaine extraordinaire de rebondissements et de bras de fer entre les deux premières puissances mondiales : le rêve américain contre le dragon chinois. Deux visions opposées de l’économie, deux systèmes de valeurs politiques, deux intelligences collectives en duel. On aime ou on n’aime pas, mais il faut reconnaître que l’autoritarisme politique appliqué à l’économie semble porter ses fruits, surtout lorsqu’il s’agit de rattraper un retard historique colossal.
Il y a 60 ans, la Chine, tout comme l’Afrique aujourd’hui, était à la marge du système économique mondial. Elle sortait à peine de son « siècle d’humiliation », traversait des guerres intestines entre nationalisme exacerbée et rêves de démocratie à l’occidentale, tout en luttant contre l’expansionnisme japonais. Et pourtant, malgré cette situation chaotique, la Chine maoïste a su rebondir, se reconstruire, s’affirmer et surtout… se projeter. Grâce à une série de dirigeants visionnaires — de Deng Xiaoping à Xi Jinping — elle poursuit depuis soixante ans une stratégie claire : l’hégémonie commerciale. Pendant ce temps, l’Occident s’égare dans une logique de domination impérialiste, répétant les mêmes erreurs d’analyse face à une Chine qu’il ne comprend toujours pas. Et c’est bien là que l’Afrique se perd aussi, en suivant aveuglément cette mauvaise lecture géopolitique.
Le gouvernement Trump, ouvertement sinophobe — quand le précédent l’était davantage à l’égard de la Russie, russophobe — n’a pas tardé à s’attaquer à la Chine. D’abord de manière progressive, en la dépouillant de ses partenariats stratégiques (comme le Canal de Panama ou certains projets miniers en RDC), puis en déclenchant une véritable guerre économique : hausse des droits de douane à 20 %, puis 84 %, jusqu’à 124 %. Bref, un embargo économique déguisé.
Déploiement sur les réseaux sociaux du Softpower Chinois
Mais ce que beaucoup n’ont pas vu venir, c’est que la Chine s’était préparée. Depuis le premier mandat de Trump, elle anticipe. Le « Grand Reset » de 2019, symbolisé par la pandémie de Covid-19, lui a permis de se restructurer pour absorber sa propre production. Et depuis 2024, un énorme travail de soft power est en marche : la culture chinoise rayonne comme jamais, les touristes affluent grâce à la suppression des visas d’entrée, et les images des villes chinoises, ultra-modernes, circulent massivement.
La Chine soigne son image, valorise son confort technologique, sa logistique irréprochable, et rend l’apprentissage du mandarin plus accessible que jamais — avec une armée de professeurs en ligne, notamment sur TikTok. La barrière culturelle est en train de tomber.
Ils ont même invité l’un des plus gros influenceurs des réseaux sociaux (38 millions d’abonnés) à parcourir le pays comme une véritable guest star, dévoilant une Chine inédite, fascinante, structurée.

C’est ainsi que le 4 Avril 2025-04 dans le Chine-info, le journaliste Hu Wenyan titre « La « IShowSpeed Mania » : quand un streamer américain bouleverse la Chine » .
Avec en sous titre : Le streamer américain, fort de ses 37 millions d’abonnés sur YouTube, suscite un enthousiasme sans précédent lors de son voyage en Chine. Il devient, malgré lui, un véritable ambassadeur du soft power chinois à l’ère du direct, flattant l’ego d’un peuple en quête de reconnaissance.
il nous explique dans son article que :
« Le séjour en Chine de l’influenceur américain IShowSpeed, de son vrai nom Darren Watkins Jr., est en passe de devenir un véritable phénomène culturel, voire interculturel. Depuis le 24 mars, la star des réseaux sociaux a posé ses valises en Chine, une étape de son périple mondial qu’il retransmet en direct. À Shanghai, son premier live dans le pays – un direct de six heures sans interruption sur YouTube – a attiré 6,5 millions de spectateurs. On le voit arpenter des lieux emblématiques, discuter avec des passants, goûter des spécialités locales… et même jouer au ping-pong avec la star de la K-Pop, Jackson Wang. Ce globe-trotter semble avoir ouvert les yeux de ses fans sur la Chine, dont certains ont salué la gentillesse des habitants, la propreté des villes et les prouesses technologiques du pays.
Cela a captivé l’attention des internautes chinois, et le hashtag « Le jeune homme hyperthyroïdien qui diffuse en direct depuis Shanghai brise les stéréotypes occidentaux sur la Chine » est rapidement devenu tendance sur Weibo. En effet, en raison de ses réactions souvent surexcitées et excessives, IShowSpeed s’est vu attribuer un surnom chinois légèrement impertinent : jiakangge, que l’on peut traduire par jeune homme hyperthyroïdien (en référence à sa particularité à faire les yeux ronds et son hyperactivité).
De Shanghai à Chongqing, en passant par Songshan et Chengdu, ce touriste VIP poursuit son séjour en Chine, davantage citadin que rural. Ses vidéos rencontrent un tel succès que les autorités chinoises ont même salué la venue de celui qui a été sacré meilleur streamer international aux Streamer Awards 2024, une sorte d’« Oscars du web ». Pour l’ambassade de Chine aux États-Unis, il « crée des canaux alternatifs permettant au public étranger de mieux connaître une Chine dynamique ». Le ministère des Affaires étrangères chinois ne cache pas non plus son enthousiasme. Comme l’a rappelé, le 1er avril, son porte-parole Guo Jiakun : « Ce phénomène atteste que les échanges culturels sino-étrangers s’enracinent dans une adhésion populaire profonde, indestructible et indissociable. »
Mais attention, la Chine est aussi un État discipliné : l’anarchie y est traquée, et tout désordre est immédiatement neutralisé. Là-bas, l’ordre n’est pas une option, c’est une règle.
C’est dans ce contexte brûlant qu’intervient l’analyse de Thami Kabbaj, trader et expert suivi par plus de 492 000 abonnés, dont les décryptages économiques sont souvent très pertinents. Son dernier podcast, publié le 13 avril 2025 sur sa chaine youtube de son nom , s’intitule : « Trump humilié par Xi… et à deux doigts d’un tsunami financier mondial ! » , en voici un petit résumé :
Trump humilié par Xi Jinping : La Chine prend le contrôle, l’Amérique recule
analyse de Thami Kabbaj – le 13 avril 2025
Nous venons d’assister à une semaine historique sur les marchés financiers, une semaine qui marque un tournant géopolitique et économique majeur. Peu de gens réalisent l’ampleur de ce qui vient de se passer : Donald Trump, l’homme qui se présente comme le maître absolu de la négociation, a été contraint de capituler face à la Chine de Xi Jinping.
Depuis 2016, puis en 2020 et aujourd’hui encore en 2024, Trump n’a cessé d’affirmer : « Je ne recule jamais ». Pourtant, les faits sont là : il a reculé. Le Wall Street Journal l’a confirmé, et d’autres médias également : Trump a annoncé qu’il n’y aurait plus de nouveaux droits de douane sur les smartphones, ordinateurs, composants électroniques, montres connectées, machines industrielles – bref, tous les produits que les Américains importent massivement de Chine.
Une capitulation économique déguisée
Appeler cela autrement qu’une reculade spectaculaire serait malhonnête. C’est une humiliation politique, stratégique et symbolique. Trump, qui voulait imposer sa loi à la Chine, vient de prouver qu’il n’avait aucune marge de manœuvre.
Pourquoi ce revirement ? Parce qu’il était dos au mur. Les États-Unis font face à une crise économique potentielle majeure :
- Taux d’intérêt en hausse
- Dollar sous pression
- Dette publique explosive, atteignant désormais plus de 35 000 milliards de dollars
Trump avait deux choix : continuer sa guerre commerciale et provoquer une catastrophe économique, ou reculer. Il a choisi la deuxième option, contraint et forcé.
La Réserve fédérale (Fed) a refusé de baisser les taux, invoquant le risque d’inflation. Jamie Dimon, PDG de JPMorgan Chase, a appuyé cette position, évoquant un risque sérieux de récession. Autrement dit, Trump était cerné.
Le dollar perd de sa superbe, la dette inquiète
Depuis son arrivée au pouvoir, le dollar a perdu de sa valeur face aux autres monnaies. Le graphique est limpide : dès l’entrée de Trump à la Maison Blanche, le dollar s’est effondré, tout comme les obligations américaines (notamment le TLT, ETF des obligations longues).
Les États-Unis doivent constamment refinancer leur dette, à des taux de plus en plus élevés. À l’époque des taux bas, cela ne posait pas problème. Aujourd’hui, la fête est finie.
Autre sujet d’inquiétude majeur : la fuite des capitaux hors des États-Unis. Pour la première fois, on observe une perte de confiance généralisée dans les obligations américaines. Même la Chine commence à se délester de ses avoirs en dette américaine, estimés à plus de 1 000 milliards de dollars.
Imaginez si d’autres États comme le Japon, les pays européens ou les puissances émergentes suivent le mouvement : nous serions face à un Armageddon financier mondial. Et Trump, malgré sa rhétorique guerrière, en est parfaitement conscient.
Le spectre du krach obligataire
Les marchés n’ont pas attendu : les obligations s’effondrent, les taux explosent. Si cette tendance se poursuit, le système financier américain vacillera. Ce serait pire que la crise des subprimes.
En réalité, Trump joue avec le feu. La bourse, déjà très fébrile, a commencé à trembler. On se souvient de l’exemple britannique : Liz Truss a suffi à ébranler la livre sterling et à provoquer une attaque spéculative. La situation américaine est similaire, voire plus grave.
Le NASDAQ s’est effondré de 26 % depuis ses sommets. Certaines actions phares comme Tesla (-56 %) ou Apple (-35 %) ont chuté lourdement. Les marchés ont parlé. Ils ne pardonnent pas l’amateurisme.
Trump entre communication erratique et panique
Dernier épisode en date : après avoir posté un message optimiste sur Truth Social en suggérant que « c’est peut-être le moment d’acheter », Trump annonce une trêve de 90 jours sur les droits de douane. Cela a suffi à faire rebondir les marchés sur une séance, mais le mal est fait.
Un président qui fait varier les marchés à coups de tweets et de déclarations à l’emporte-pièce : est-ce un chef d’État ou un illusionniste ?
Désolé si cela heurte certains partisans de Trump, mais ce n’est pas sérieux. Nous vivons une époque de bascule économique mondiale, et la Chine est en train de prendre le contrôle stratégique pendant que les États-Unis se débattent dans une dette abyssale et un déficit de crédibilité.
Conclusion :
L’humiliation de Trump cette semaine est le symptôme d’un basculement du pouvoir économique mondial. Ce n’est pas simplement une guerre commerciale qui s’achève, mais un changement d’équilibre. Et face à une Chine patiente, structurée, et stratège, les États-Unis apparaissent fébriles, divisés, et vulnérables.
Le dollar n’est plus intouchable, la dette américaine n’est plus sacrée. Les marchés sont les vrais juges, et ils ont tranché.
Ce que l’on doit retenir : Il y a eu Echec mais pas Mat
Cette semaine, Donald Trump a capitulé.
Face à la Chine.
Face au monde.
« I could go through that wall… I’m going to go through it no matter what. Keep going. And if you can’t go through the wall? Sometimes you have to be able to go under the wall, around the wall, or over the wall. These guys know that better than anybody. » – Donald Trump
(« Nous pourrions affronter frontalement cet obstacle… et nous le ferons. Mais lorsque la confrontation directe échoue, la stratégie impose de le contourner, de le saper ou de le survoler. Nos adversaires en ont fait une spécialité. »)
Toute la complexité de son mandat réside là : faire passer les États-Unis du statut d’Empire à celui d’une Nation puissante, recentrée sur ses intérêts vitaux.
Mais le 7 avril 2024, Trump commet une erreur qui pourrait lui coûter bien plus que des points dans les sondages : il confirme publiquement qu’il ne relâchera pas les droits de douane, malgré une pression internationale de plus en plus pesante. Il ira même jusqu’à déclarer : « Le monde entier me lèche le cul pour passer des accords. »
Dès le lundi 7 avril, les taux longs remontent, et la Chine réplique sèchement, annonçant qu’elle tiendra tête jusqu’au bout. Le 9 avril, Trump plie. Il décrète un moratoire de 90 jours sur les droits de douane mondiaux – sauf pour la Chine. Le symbole est lourd. Il n’a pas été renversé. Mais il est tombé.
Car derrière l’homme fort, c’est le projet tout entier qui vacille : celui de reconversion de l’empire.
Trump sait que rayonner coûte plus cher que cela ne rapporte, que les attributs d’hégémonie – dollar dominant, armée dissuasive – ne fonctionnent plus. Le monde, post-2008, amorce déjà la dédollarisation, menée par la Chine et les BRICS.
La tentative de réforme était brutale mais structurée :
- Réduction des déficits internes, notamment via le Dodge piloté par Elon Musk.
- Désengagement géopolitique, notamment d’Ukraine.
- Rééquilibrage commercial, via des droits de douane tous azimuts.
Mais la méthode a dépassé l’intention. Trump a insulté les partenaires, sous-estimé la Chine, et surévalué l’impact du rapport de force. Le 9 avril, son propre camp (y compris Ted Cruz) lui intime de reculer.
Et là, la messe est dite.
Certes, ce n’est pas l’effondrement immédiat. Le dollar résiste encore. Les marchés s’ajustent. Mais la narration a changé : l’Amérique ne fait plus peur. Elle ne protège plus. Elle n’impose plus.
La suspension des droits de douane sonne comme une pause dans une bataille plus large : celle d’une transition hégémonique qui aurait dû être progressive, subtile, collective – et non brutale et solitaire.
Le monde a compris. L’Empire est derrière. La désolarisation est amorcée.
Et désormais, c’est l’indépendance industrielle, partout dans le monde, qui devient le vrai sujet.
Alors oui, il y a eu Echec.
Mais non, il n’y a pas eu Mat.
Le jeu continue. Et la Chine, plus que jamais, avance ses pions.